Je possède, je crois, une essence ornithologique
Une réminiscence, peut-être, d’une vie antérieure
Ce désir de n’agir que pour ma survie
De céder à l’instinct grégaire de la volaille
D’exister, sans raison
Je rêve d’une destinée sans éclat
Cueillir, çà et là quelques baies
Rassembler les brindilles nécessaires
À parfaire bêtement mon nid
Y mettre au monde des oisillons sitôt envolés
J’aimerais m’accoupler lorsque le dicte la saison
Sans autre excitation que de répondre au rut
M’exhiber les plumes, sans risquer de les perdre
Épargnée des incertitudes qui succèdent à l’orgasme
La peur du vide, de l’abandon
Et je veux, comme les oiseaux,
Pressentir les jours obscurs
Savoir m’évader au soleil avant la tempête
Oui, je veux, comme eux, être libre
Sans porter le poids de mon affranchissement
Alors que je marche, sans jamais savoir si j’avance
Les oiseaux traversent le bleu du ciel et des océans
Et sans autre ambition que celle, candide, de voler
Ils atteignent les plus hauts sommets
Sans quête de réussite ni besoin de reconnaissance
Leur battement d’ailes assuré ébranle celui de mes paupières
Toujours indécises de voir plus grand, ou de se clore plus fort
Les oiseaux n’ont rien de ce qui me tue
Le talent en latence
L’envie d’aimer en décrépitude
Les peines, d’amour infini
Ils se nichent au creux de mes mots perdus
Et s’abreuvent de mes larmes
Que pourraient donc m’envier les oiseaux?
Eux qui savent que lorsqu’on fuit les vents d’hiver
On finit toujours par revenir au bercail
Là où se déploient nos vieilles blessures
Telles les ailes de ces oiseaux qui nous font rêver
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